Le Makhzen ne doit pas être content. Ses positions sur tous les fronts et sur toutes les questions sont, en effet, fortement ébranlées. Les critiques pour son refus de se conformer à la légalité internationale dans la question sahraouie se font plus fortes et plus récurrentes, ces derniers temps. Plus précisément, depuis le 13 novembre dernier quand sa soldatesque a lâchement agressé, à El Guerguerat, à l’extrême sud-ouest du territoire du Sahara Occidental occupé, des citoyens sahraouis qui protestaient pacifiquement contre l’ouverture, contraire à l’accord de cessez-le-feu signé, en septembre 1991, sous l’égide des Nations unies, entre le Front Polisario et le royaume du Maroc, alors dirigé par Hassan II, d’une brèche dans le mur “de la honte et de l’humiliation”. Des critiques qui ont gagné en intensité après que le désormais ancien président étasunien, Donald Trump, eut, concomitamment, annoncé, le 10 décembre 2020, la normalisation officielle – parce que sur le plan officieux, celles-ci remontaient déjà à au moins cinq décades – des relations du royaume de M6 avec l’entité sioniste, et sa reconnaissance – faite, faut-il le rappeler, par un simple tweet – de la marocanité du Sahara Occidental. Des critiques que le Makhzen a beau jeu de rejeter en usant et abusant de son argument éculé que celles-ci sont le fait des “ennemis du royaume, de son unité et de son intégrité territoriale”. Ce qui n’est pas pour étonner venant d’un Etat qui a érigé le mensonge et la duplicité en moyens de gouvernance privilégiés. Sauf que dans le cas qui nous intéresse, il lui sera particulièrement difficile d’user d’un tel argument éculé. A moins de considérer un membre de la famille royale comme un ennemi. Ce qui serait une couleuvre vraiment difficile à faire avaler au peuple marocain mais également à tous ceux, à travers le monde, qui s’intéressent à la question sahraouie. En effet, il est difficile de traiter le propre cousin germain de Mohamed VI – il est le fils de Moulay Abdallah, le frère du roi Hassan II – “d’ennemi”. Et ce, même si Hicham El Alaoui, c’est de lui qu’il s’agit, est connu pour avoir été toujours critique à l’égard de la monarchie alaouite. Il n’a de cesse, en effet, de réclamer le passage urgent à une monarchie constitutionnelle, seule à même, selon lui, d’éviter à la monarchie alaouite de disparaître. L’absence de réponse – faut-il s’en étonner? – à ses appels réitérés l’ont poussé, bien qu’il soit classé en quatrième position dans l’ordre de succession au trône, à demander, par une lettre qui lui a transmise en décembre 2018, à Mohamed VI “de le déchoir formellement de son titre de prince”. Bien mieux, dans un entretien accordé, le même mois, à France 24, une chaîne de télévision financée par l’Etat français, il a confirmé sa demande tout en révélant qu’il lui avait également expressément demandé “d’être enterré, après sa mort, dans un endroit sans rapport avec la monarchie”. Le hiatus existant entre le Palais royal et celui que la presse occidentale – française, surtout – qualifie de “Prince rouge” ou “Prince rebelle”, ne semble pas près de se refermer. Bien au contraire, il semble s’élargir. Dans une contribution libre à une publication internationale, que rapporte le site El Portal diplomatico, Hichem El Alaoui n’a pas hésité à afficher des positions qui ne peuvent que fâcher son cousin et le Makhzen. Surtout que ces positions touchent au sujet sensible du Sahara Occidental. Sans fioriture aucune, il a appelé à ce que “le problème (y afférent) soit réglé dans le cadre des valeurs démocratiques, des droits de l’homme et du droit international”. Comme pour ne laisser aucun doute sur ses convictions profondes sur le sujet, il a veillé à utiliser, dans toute sa contribution, l’expression “Sahara Occidental”. Il n’y a pas à dire, la voix du “Prince rouge” détonne et fort dans le sérail alaouite…
Mourad Bendris