Saïda Neghza (Présidente de la CGEA); “L’Administration, un danger pour le pays”

dzairtube

  Connue pour ne pas avoir la langue dans sa poche, la présidente de la CGEA (Confédération générale des entreprises algériennes) s’en est vertement prise, dans une interview accordée récemment au quotidien Le Jour d’Algérie, à l’Administration. Pour Saïda Neghza, cet ensemble “sclérosé, dont la composante est issue à 90% de l’ancien système, constitue un véritable danger pour le pays”. Et ce, a-t-elle expliqué, de par “sa capacité de nuisance” qui lui permet “de saboter n’importe quel secteur d’activité”. Et de passer outre les instructions de n’importe quel ministre. Sauf qu’elle ne s’est pas limitée à ces seules accusations; la présidente de la CGEA a, en effet, ouvertement et clairement accusé “cet ensemble sclérosé (…) de travailler contre le programme du président de la République”. De là, à l’évidence, son appel pressant, adressé au Premier ministre Abdelaziz Djerad, à procéder, “en urgence, à un changement en profondeur dans sa composante”. C’est avec le même ton mordant qu’elle s’en est également pris à ceux des responsables qui invoquent la crainte de poursuites judiciaires ou de sanctions qui pourraient être prises contre eux s’ils venaient “à piétiner les plates-bandes de certaines parties”: Quand on accepte un poste de ministre ou de directeur ou autre, on doit être capable d’assumer ses responsabilités sinon on change de métier et on laisse la place aux autres”, a-t-elle déclaré. Non sans ajouter pour, à l’évidence, préciser sa pensée et, par la même, souligner l’irrecevabilité de l’argument de la crainte comme justificatif à l’inertie, que “quand on n’a rien mis dans sa poche on n’a rien à se reprocher et on travaille sereinement”. Pour Saïda Neghza, l’invocation d’un tel argument cache en réalité des intentions peu avouables de sabotage d’un secteur donné. Et de citer, ceux de la minoterie et de la tomate industrielle où l’intervention de la CGEA a permis, a-t-elle révélé, de faire échec aux manœuvres, allant dans ce sens, de l’Administration. Comme pour mieux faire ressortir le rôle néfaste que joue l’Administration dans le blocage de nombre de secteurs d’activité, Saïda Neghza a tenu à rapporter, non sans s’en réjouir, les incidences positives qu’a eues pour la CGEA la rencontre qu’elle a eue, il y a peu, avec le Président Tebboune: “Au lendemain de cette rencontre, toutes les portes des ministères se sont ouvertes devant nous et les demandes d’audience que nous avions adressées à nombre de ministères, ont toutes reçu des réponses”, a-t-elle révélé. Dans la foulée, et tout en regrettant, dans le fond, un tel état de fait – il a fallu une rencontre avec le président de la République pour que les choses bougent -, elle s’est réjouie de voir celui-ci “instaurer de nouvelles règles de travail, d’écoute et de développement”. Bien mieux, a-t-elle précisé, “il a de bonnes et sincères intentions pour le pays”. C’est, à l’évidence pour toutes ces raisons, que la présidente de la CGEA appelle à soutenir le Président Tebboune dans son entreprise de remise sur rails du pays. Une “remise sur rails” qui, a-t-elle laissé entendre, ne peut faire l’économie d’une épuration de l’Administration de “tous les gens qui y sont embusqués et qui cherchent à déstabiliser tout élan ou volonté d’aller de l’avant”. Ces dispositions favorables à l’égard du président de la République n’ont pas empêché Saïda Neghza de critiquer l’action du gouvernement; celui d’avant le remaniement du dimanche 21 février, s’entend. Elle n’a pas manqué, en effet, de s’interroger sur les retards que connaît la concrétisation des engagements du Président Tebboune à développer “l’industrie de transformation”; plus particulièrement, “celle qui valorise la ressource locale”. Des interrogations qui se sont étendues au peu d’intérêt qui, selon elle, semble être accordé “à l’industrie textile” mais également “à la production d’engins agricoles et de travaux publics”. Et ce, au moment où, a-t-elle déclaré, “on cherche à tout prix à faire une autre aventure de montage automobile”. Sans le dire expressément, la présidente de la CGEA semble faire porter la responsabilité de tous ces “ratés” à Ferhat Aït Ali, le désormais ancien ministre de l’Industrie. Ce qui transparaît nettement dans son péremptoire: « l’arrivée de ce ministre à ce poste sensible de l’Industrie est un véritable accident de parcours”. Tout en insistant sur la nécessité de rapidement rectifier le tir pour permettre à l’Algérie de retrouver la voie d’un développement harmonieux, cohérent et profitable à son peuple, la présidente de la « doyenne des organisations patronales nationales » a regretté, pour mieux les condamner, l’incompréhensible refus de l’ancien système de profiter alors de la dimension internationale de la CGEA pour booster ce développement. Notamment, lorsqu’elle avait fait venir à Alger, en 2019, le président de l’OIE (Organisation internationale des employeurs), “le plus grand patronat mondial regroupant quelque 50 millions d’entreprises de 150 pays”: “Aucun responsable d’alors n’a daigné le recevoir”. Dans la foulée, elle est revenue sur toutes les misères qui lui ont été faites pour la  “déloger”, au profit, a-t-elle déclaré, de l’ancien chef du FCE, aujourd’hui incarcéré, Ali Haddad, de toutes les organisations internationales dont elle était membre. De l’OIE, surtout, dont elle est la vice-présidente, mais également de Business Africa, une organisation à laquelle participent des organisations patronales de 54 pays africains, dont elle est présidente, et de Businessmed, une organisation à vocation méditerranéenne qui compte 22 confédérations originaires de 19 pays de la Méditerranée, dont elle a été, pendant trois années, vice-présidente.

Mourad Bendris

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