Un scandale choquant a éclaté autour de l’écrivain franco-algérien Kamel Daoud, dont la récente victoire du prestigieux prix Goncourt pour son roman Houris a fait l’objet d’une attention particulière. Des accusations ont fait surface selon lesquelles le roman, présenté comme une représentation fictive de la « décennie noire » algérienne, serait en fait une exploitation flagrante du traumatisme réel d’une Algérienne, Saâda Arban, qui a accusé Daoud d’avoir détourné ses expériences pénibles sans son consentement.
Saâda, une survivante d’une attaque brutale qui a anéanti sa famille pendant la guerre civile algérienne, a rompu son silence, déclarant son intention d’engager des poursuites judiciaires contre Daoud et sa femme. Cette dernière, une psychothérapeute, soignait Saâda depuis 2015 pour les graves cicatrices psychologiques et physiques résultant de l’attaque. Saâda affirme que Daoud a utilisé son histoire profondément personnelle comme base de son roman primé, violant ainsi sa confiance et son droit à la vie privée.
Une histoire de trahison et d’exploitation
Dans un segment d’enquête diffusé par One TV, Saâda a révélé son calvaire, racontant comment elle n’avait que six ans lorsque sa famille a été massacrée à Tiaret, lui laissant des blessures permanentes, notamment des dommages aux cordes vocales. Parlant par l’intermédiaire de son mari espagnol qui la soutenait, elle a décrit le choc et la dévastation qu’elle a ressentis en découvrant que des détails de sa vie, des cicatrices sur son cou à son histoire médicale et à ses luttes personnelles, étaient reproduits dans Houris.
Selon Saâda, les révélations ont été révélées lorsqu’un ami en France a reconnu les similitudes frappantes entre la protagoniste du roman et son histoire réelle. Bien qu’elle ait fermement refusé les propositions antérieures de Daoud de transformer ses expériences en œuvre littéraire, elle a été horrifiée d’apprendre qu’il avait procédé sans sa permission, réduisant sa souffrance à un fourrage pour ses ambitions artistiques.
En outre, Saâda a raconté comment l’épouse de Daoud a tenté de l’apaiser en lui offrant un exemplaire dédicacé du livre, sur lequel était inscrit un message louant son courage. Ce geste creux, associé aux suggestions d’adapter le roman en film, n’a fait qu’aggraver le sentiment de trahison de Saâda.
Démasquer les violations
Saâda a fourni des preuves concrètes pour étayer ses allégations, notamment des dossiers médicaux, de la correspondance personnelle et des photographies documentant ses blessures. Son témoignage dresse un tableau accablant de fautes professionnelles et de manquements à l’éthique.
Le roman fait désormais face à de graves questions éthiques. Les critiques affirment qu’il représente une violation de la confidentialité des patients et un exemple flagrant de la façon dont les voix marginalisées sont récupérées et exploitées à des fins personnelles.
La controverse soulève également des questions sur le rôle de l’épouse de Daoud. A-t-elle sciemment partagé les informations confidentielles de son patient, ou a-t-elle été complice de l’exploitation de son mari ? De tels actes, s’ils sont prouvés, non seulement violent l’éthique professionnelle, mais soulignent également un mépris troublant pour la dignité et l’autonomie des survivants de traumatismes.
Silence et indignation publique
Ni Daoud ni sa femme n’ont répondu aux accusations, gardant un silence ostentatoire qui n’a fait qu’alimenter l’indignation publique. De son côté, Saâda a clairement fait savoir qu’elle ne se reposerait pas tant que justice ne serait pas rendue. « Personne n’a le droit de décider quand, comment ou si mon histoire doit être racontée », a-t-elle affirmé en larmes.
La réaction contre Daoud a relancé les débats sur les responsabilités des auteurs et les limites éthiques de la narration. Alors que le prix Goncourt célèbre la réussite littéraire, ce scandale jette une ombre sur sa légitimité, soulevant des questions gênantes sur le coût du succès créatif.
Alors que le combat de Saâda pour la justice prend de l’ampleur, cette affaire sert de sombre rappel des dynamiques de pouvoir dans le monde littéraire, où la souffrance des plus vulnérables peut trop facilement être marchandisée. Le courage dont fait preuve Saâda face à cette injustice est un puissant réquisitoire contre ceux qui voudraient exploiter la tragédie pour obtenir la gloire.
La communauté littéraire et le grand public attendent désormais la réponse de Kamel Daoud, dont la réputation est en jeu. Reconnaîtra-t-il ses actes ou son silence en dira-t-il long ?