La cour régionale supérieure de Düsseldorf en Allemagne a rendu un verdict condamnant un citoyen marocain âgé de 36 ans à une peine de un an et neuf mois de prison avec sursis, après l’avoir reconnu coupable d’avoir espionné, pour le compte des services de renseignement marocains, des sympathisants du mouvement de contestation marocain « Hirak du Rif » résidant en Allemagne. Selon le jugement, l’accusé avait déjà passé neuf mois en détention provisoire avant le verdict, et il devra également payer une amende de 4 300 euros.
L’affaire révèle que l’accusé, identifié par la cour sous le nom de « Mohamed A. », avait été arrêté le 14 novembre 2022 dans la région de Cologne par l’Office fédéral de police criminelle allemande. L’acte d’accusation a démontré qu’il travaillait pour la Direction générale des études et de la documentation (DGED), le service de renseignement extérieur marocain. Entre avril 2021 et mars 2022, il aurait transmis aux agents marocains des informations sur les activités de militants rifains établis en Allemagne, en échange de frais de déplacement estimés à environ 5 000 euros.
Ironiquement, l’accusé était auparavant connu comme blogueur favorable au Hirak depuis l’Europe, publiant des critiques à l’égard du régime marocain. Cependant, selon les documents judiciaires, c’est lors d’une visite au consulat marocain de Düsseldorf, au début de l’année 2020, pour obtenir un certificat de bonne conduite, qu’il aurait été approché par un fonctionnaire lié aux services de renseignement et recruté comme informateur.
Cette condamnation s’inscrit dans une série de procès intentés en Allemagne contre des réseaux soupçonnés d’espionner la diaspora marocaine. L’objectif principal de ces opérations est de surveiller et de neutraliser les opposants politiques du régime, en particulier les militants liés au mouvement du Rif. En août 2023 déjà, un autre Marocain avait été condamné à une peine similaire pour des faits comparables d’espionnage.
L’affaire a suscité de vives critiques en Allemagne, car elle met en lumière l’ampleur des activités des services secrets marocains sur le sol européen. Elle survient au moment où Rabat et Berlin cherchent à renforcer leur coopération bilatérale, notamment dans les domaines sécuritaires et migratoires. Pour de nombreux observateurs, ce scandale ternit l’image d’un Maroc qui tente de se présenter comme un partenaire fiable de l’Europe tout en ayant recours à des méthodes d’espionnage controversées.
Les autorités marocaines, de leur côté, ont catégoriquement nié toute implication officielle dans l’affaire. Elles affirment que l’accusé n’a aucun lien avec les services secrets et qu’il s’agit d’un individu radicalisé hostile à l’État. Toutefois, les enquêtes judiciaires allemandes pointent des preuves de coordination directe avec le renseignement marocain, ainsi que des paiements versés en contrepartie des informations fournies.
Cette affaire illustre non seulement la vulnérabilité des communautés d’exilés marocains face aux pressions de Rabat, mais également les limites de la coopération entre le Maroc et ses partenaires européens. Pour les militants rifains installés en Allemagne, le verdict de Düsseldorf est perçu comme une victoire symbolique qui reconnaît officiellement qu’ils font l’objet d’une surveillance organisée par l’État marocain