الثلاثاء 05 أوت 2025

Des cinéastes internationaux protestent contre le réalisateur britannique Christopher Nolan pour son tournage de « L’Odyssée » au Sahara occidental

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By: Ahmed achour
Des cinéastes internationaux protestent contre le réalisateur britannique Christopher Nolan pour son tournage de « L’Odyssée » au Sahara occidental

Le réalisateur britannique Christopher Nolan est au cœur d’une controverse après avoir tourné des scènes de son nouveau film à succès, L’Odyssée, à Dakhla, au Sahara occidental, territoire occupé par le Maroc depuis 1975 et en attente de décolonisation selon les Nations Unies.

Le Festival international du film du Sahara (FiSahara) a publié ce lundi un manifeste accusant Nolan, Universal Pictures et les sociétés de production impliquées d’être des « complices involontaires » de l’occupation marocaine. Cette déclaration bénéficie déjà du soutien de plus de 100 artistes, cinéastes, militants et défenseurs des droits humains qui exigent un changement d’attitude public de la part du réalisateur britannique.
Signataires

Parmi les signataires figurent Javier Bardem, Rodrigo Sorogoyen, Icíar Bollaín, Juan Diego Botto, Carolina Yuste, Itziar Ituño, Luis Tosar, Javier Gutiérrez, Nathalie Poza, Aitana Sánchez Gijón, Amparo Sánchez et Eliseo Parra, ainsi que des cinéastes internationaux tels que Paul Laverty, David Riker et Lurdes Pires. La liste est complétée par des personnalités sahraouies comme le célèbre défenseur des droits humains ElGhalia Djimi, victime de disparition forcée depuis des années dans les prisons marocaines.

« Jusqu’à ce que Nolan et son équipe brisent leur silence, le Maroc se fait le porte-parole de la production et les rend complices de la répression contre le peuple sahraoui », dénonce María Carrión, directrice exécutive de FiSahara. L’organisation note que, tandis qu’Hollywood garde le silence, le ministre marocain de la Culture a salué le tournage comme une étape vers la transformation de Dakhla en un plateau de tournage international.

La controverse s’est intensifiée après que le ministre lui-même s’est vanté sur les réseaux sociaux d’avoir rencontré Nolan et l’actrice Charlize Theron, ambassadrice des Nations Unies pour l’élimination des violences faites aux femmes. « Je suis sûre que Charlize Theron ne soutiendrait pas les violences sexistes commises systématiquement par les forces d’occupation contre les femmes sahraouies », a souligné Carrión.

Le manifeste de FiSahara appelle à trois actions concrètes : que Nolan et Universal Pictures reconnaissent publiquement qu’ils n’auraient pas dû tourner à Dakhla ; qu’ils n’utilisent pas les images filmées dans le montage final de L’Odyssée ; ou, à défaut, qu’ils obtiennent le consentement du peuple sahraoui par l’intermédiaire de ses représentants légaux.

L’initiative bénéficie du soutien du mouvement international de solidarité avec le Sahara occidental, qui appelle Nolan à user de son influence pour sensibiliser le public à la situation critique d’un peuple pris au piège entre occupation militaire, répression et exil dans les camps de réfugiés de Tindouf (Algérie), où le festival se tient chaque année.

« Si Nolan souhaite comprendre la réalité sahraouie, nous l’invitons à séjourner auprès d’une famille de réfugiés à Tindouf. Il n’y a pas de meilleur cadre pour comprendre ce que signifie vivre un demi-siècle dans l’attente d’un référendum qui n’a jamais eu lieu », conclut Carrión. Pendant ce temps, l’équipe d’Odyssey garde un silence absolu.

Javier Bardem se joint à la dénonciation du tournage controversé de Nolan au Sahara occupé par le Maroc

Javier Bardem a une fois de plus braqué les projecteurs sur le Sahara occidental. L’acteur espagnol, historiquement engagé pour la cause sahraouie, a ouvertement critiqué le tournage du nouveau film de Christopher Nolan à Dakhla, ville occupée par le Maroc depuis 1975. Dans un message sur les réseaux sociaux, Bardem a dénoncé que « depuis 50 ans, le Maroc occupe le Sahara occidental, expulsant le peuple sahraoui de ses villes. Dakhla en fait partie.»

Sa déclaration intervient dans un contexte de controverse autour de L’Odyssée, le blockbuster de Nolan avec Matt Damon et Zendaya. Une partie du film a été tournée à Dakhla occupée, une enclave que Rabat a transformée en destination touristique et désormais cinématographique. Pour les militants sahraouis et les organisateurs de FiSahara, transformer ce territoire en décor hollywoodien constitue un acte de légitimation culturelle de l’occupation, une tentative d’effacer la mémoire des personnes déplacées et de présenter comme normale une situation encore marquée par la spoliation et la répression.
Un tournage transformé en propagande

L’utilisation de ce tournage à des fins de propagande était explicite. Lors du tournage, le ministre marocain de la Culture, de la Jeunesse et de la Communication, Mehdi Bensaïd, s’est rendu sur le plateau et a salué devant la presse que ce film à succès contribuerait à « accroître la visibilité internationale de Dakhla en tant que destination touristique et cinématographique ». Il a ajouté que le gouvernement marocain favoriserait la création d’une école de cinéma dans la ville, convaincu que le tournage de Nolan attirerait davantage de sociétés de production étrangères et renforcerait l’image des « provinces du Sud » [terme utilisé par le régime marocain pour désigner le Sahara occidental, dernier territoire africain en attente de décolonisation] comme « un pôle culturel et moderne ».

Pour les militants sahraouis, ces déclarations confirment l’utilisation du cinéma comme outil de propagande. Présenter Dakhla comme un paradis touristique et cinématographique, insistent-ils, revient à blanchir l’occupation et à occulter la réalité d’un peuple déplacé qui attend toujours un référendum d’autodétermination approuvé par l’ONU, un demi-siècle après le retrait espagnol.
Les Deux Visages de Dakhla

Alors que les caméras hollywoodiennes capturent des paysages de plages immaculées et d’avenues nouvellement construites, derrière l’image de carte postale se cache une ville profondément militarisée. Les Sahraouis dénoncent la surveillance constante, le manque de libertés et l’expulsion systématique des journalistes et des observateurs internationaux. Dans les camps de réfugiés de Tindouf, dans le désert algérien, des dizaines de milliers de personnes continuent de vivre dans des conditions précaires, en attendant de pouvoir rentrer chez elles.

Le tournage, bien que bref, a suscité un sentiment de doléance. Pour les Sahraouis, voir des stars internationales se produire dans leurs anciennes villes équivaut à une seconde expulsion : symbolique cette fois. « Transformer Dakhla en plateau de tournage, c’est effacer notre histoire et notre présence », répètent les militants.
Bardem, une voix dérangeante pour l’industrie cinématographique

Bardem n’est pas un novice dans cette cause. Depuis des années, il participe à des documentaires et à des événements dénonçant la situation des Sahraouis. Son message actuel, implicitement adressé à l’industrie cinématographique, questionne les limites éthiques du cinéma lorsqu’il tourne en territoires occupés. Il y a treize ans, Bardem a tourné le documentaire « Les Enfants des Nuages », consacré à l’exil des Sahraouis, habitants de l’ancienne colonie espagnole occupée par le Maroc depuis 1975.

Ni Christopher Nolan ni les auteurs de L’Odyssée n’ont répondu à ces critiques jusqu’à présent, un silence qui alimente le débat sur la responsabilité des grandes productions dans les contextes de conflit.
Cinéma et mémoire en conflit

Le cas de L’Odyssée illustre comment la culture peut devenir un champ de bataille symbolique. Pour le Maroc, ce tournage est un triomphe de propagande : la projection d’une ville prétendument moderne et ouverte sur le monde. Pour les Sahraouis, c’est la confirmation que leur histoire continue d’être rendue invisible, remplacée par une image de carte postale qui ignore des décennies d’exil et de répression.

La dénonciation de Bardem, suite à la censure des militants sahraouis, a remis la question à l’ordre du jour international, soulignant que le Sahara occidental n’est pas un simple décor de cinéma. C’est un territoire marqué par une occupation qui perdure dans l’ombre et par un peuple qui attend toujours la solution de son sort.

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