mardi, 9 septembre, 2025

Deux ans après le séisme d’Al-Haouz… une plaie béante qui révèle l’échec du Makhzen et l’abandon de la région

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Deux ans après le séisme d’Al-Haouz… une plaie béante qui révèle l’échec du Makhzen et l’abandon de la région

Deux ans se sont écoulés depuis le séisme meurtrier d’Al-Haouz, mais le temps n’a pas refermé les blessures. Pire encore, la catastrophe a montré que le drame n’était pas seulement naturel : il a mis à nu l’échec de l’État et la marginalisation chronique des montagnes de l’Atlas. Entre promesses officielles non tenues et familles toujours sous des tentes délabrées, il apparaît clairement que ce qui a ébranlé le Maroc n’était pas seulement la terre, mais aussi la confiance dans un système qui préfère soigner son image que protéger ses citoyens.

Le 8 septembre 2023, un tremblement de terre a ravagé la région d’Al-Haouz. Deux ans plus tard, le constat est accablant : des centaines de familles vivent encore sous des tentes qui ne les protègent ni du froid glacial de l’hiver ni de la chaleur écrasante de l’été. Les discours gouvernementaux se sont succédé, les chiffres ont été brandis, mais sur le terrain, la réalité reste celle de l’abandon.

La tragédie, désormais, dépasse la catastrophe naturelle. Elle incarne la faillite d’une politique publique incapable de répondre aux besoins fondamentaux de populations déjà marginalisées. Les promesses d’indemnisation et de reconstruction n’ont été que partiellement réalisées, souvent dans l’opacité et au profit de quelques-uns. De nombreuses familles se sont vues exclues des listes de bénéficiaires, tandis que leurs souffrances servaient d’arguments de communication pour le pouvoir.

Les écoles restent inachevées, les centres de santé détruits n’ont pas été réhabilités, et des villages entiers continuent à vivre dans l’isolement, faute de routes et d’infrastructures. Pour beaucoup, l’exode vers les villes est devenu la seule issue, aggravant leur précarité sociale et économique.

Pire encore, certaines voix locales accusent les autorités d’avoir tenté de profiter de la reconstruction pour déplacer des familles de leurs terres, sous couvert d’urbanisation et de « mise aux normes ». Une démarche perçue comme la continuité d’une politique de dépossession, qui nourrit la méfiance et alimente le sentiment d’injustice.

Deux ans après, le flou persiste sur les milliards annoncés pour la reconstruction. Où sont passés ces fonds ? À qui ont-ils profité ? Le soupçon d’un détournement ou d’une gestion clientéliste est omniprésent, rappelant le scandale du projet « Al Hoceima, phare de la Méditerranée », qui s’est soldé par des démissions de façade, sans véritable reddition de comptes.

Le séisme a détruit des maisons, mais il a surtout ébranlé la confiance des citoyens envers leurs institutions. Dans le Haut Atlas, les habitants ont l’impression d’avoir été abandonnés, alors même que l’État consacre ses ressources à des projets de prestige dans les grandes villes ou dans le Sahara occidental occupé. Ce contraste renforce l’impression que la vie des sinistrés ne vaut rien face à la logique du pouvoir et des grandes affaires.

Amina, veuve quinquagénaire d’un douar près de Tahnaout, témoigne : « On nous a promis des maisons, mais après deux ans je vis toujours avec mes enfants dans une tente trouée. Nous n’avons reçu que des aides occasionnelles. L’État nous a oubliés ».
De son côté, Mohamed, un agriculteur âgé qui a perdu sa maison, confie : « Ils veulent prendre ma terre sous prétexte de reconstruction. Nous voulons rebâtir, mais sur notre terre. Le Makhzen ne nous voit pas comme des citoyens, seulement comme des obstacles ».

La commémoration de ce séisme devrait être un temps de mémoire et de solidarité. Elle est devenue, au contraire, un réquisitoire contre un système qui a failli à ses responsabilités les plus élémentaires. Comment accepter que, deux ans après, des milliers de Marocains soient encore sans abri, alors que le pouvoir dépense sans compter pour des contrats d’armement ou des chantiers de prestige ?

Le séisme d’Al-Haouz a révélé une vérité brutale : au Maroc, l’État est plus prompt à sauver son image qu’à sauver ses citoyens. Deux ans après, la plaie reste béante, et avec elle la preuve que derrière la façade d’un « nouveau modèle de développement », le Makhzen perpétue les mêmes logiques de négligence, d’opacité et de mépris.

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