Le 16 du mois en cours, un grand rassemblement a eu lieu dans la ville de Kherrata, dans la wilaya de Bejaïa. On n’a dit que c’était pour commémorer le deuxième anniversaire du Hirak. Ceux qui ont appelé à ce rassemblement considèrent, en effet, que ce dernier n’a pas débuté le 22 février 2019 mais le 16 du même mois. Et à partir de la ville précitée. Qui a la particularité d’être située en Kabylie. La présence, hier, à Kherrata de Mohcine Belabbas, président du RCD, de Karim Tabbou, de Fodil Boumala, de Zoubida Assoul et de Mustapha Bouchachi, entre autres personnalités fortement engagées dans le Hirak, indiquent que ni l’un ni l’autre ne sont fortuits. Comme ne peut pas l’être la présence à cet événement de personnes venues de tous les coins d’Algérie. Tout est fait, à l’évidence, pour que la date du 22 février, comme date anniversaire du Hirak, s’efface au profit du 16 février. Et pour que Kherrata en devienne l’unique berceau. Toute la question est de savoir à quels objectifs inavoués obéissent de telles manœuvres. Des observateurs avertis de la scène politique nationale voient dans cette tentative d’imposer la date du 16 février 2019 comme date anniversaire du Hirak, une réaction à la décision du président Tebboune d’officialiser celle du 22 février et de l’ériger en “Journée nationale de la fraternité et de la cohésion entre le peuple et son armée pour la démocratie”. En tentant d’imposer la date du 16 février, soutiennent-ils, les commanditaires du Hirak visent plusieurs objectifs; les plus plus patents étant celui de réaffirmer leur déni de toute légitimité à l’élection du président Tebboune et, partant, de tout droit à s’approprier celui-ci, et celui de marquer leur rejet du thème précité choisi pour la Journée nationale susmentionnée. Un rejet qui, lui aussi, est loin d’être fortuit. Pour nombre d’observateurs, il est révélateur des objectifs inavouables des commanditaires du Hirak d’empêcher l’ANP, en exigeant d’elle qu’elle “retourne à ses casernes”, de s’acquitter de son rôle constitutionnel de protection du pays et de ses institutions. Et ce n’est pas pour rien que le fameux, et pernicieux, slogan de “Dawla madania machi askaria” (Un État civil et non militaire) a été scandé à l’envi, le 16 février 2021, à Kherrata. Moins avouable de par les dangers qu’il suppose pour les stabilité et sécurité du pays, un autre objectif transparaît de telles manœuvres: celui de pousser à la déstabilisation du pays et ce, comme première étape de son démembrement souhaité. Et programmé. Il est pour le moins étonnant que des “démocrates” s’acharnent à recourir aux manifestations de rue pour imposer leur vision des choses alors que le pays est à la veille d’élections législatives dont l’importance n’échappe à personne. Et que ces élections, comme la Présidentielle de décembre 2019, ne seront pas organisées par l’Administration mais par une Autorité indépendante – l’ANIE (Autorité nationale indépendante des élections) – dont l’existence et le fonctionnement ont été intégrés dans la constitution amendée du 1er novembre 2020. Faut-il le rappeler, une instance dont l’opposition, y compris, sa frange toujours impliquée dans le Hirak, a toujours revendiqué la mise en place.
Le Hirak a-t-il un autre objectif que celui proclamé?
Quant à la manœuvre de faire de Kherrata l’unique berceau du Hirak, les mêmes observateurs l’expliquent par les incessantes entreprises menées par des parties, algériennes et étrangères, œuvrant inlassablement à attenter à l’unité du pays. Parmi ces entreprises, la singularisation de la Kabylie. Et ce, sur tous les plans. En lui accordant la paternité du Hirak, ne cherche-t-on pas à faire de l’exhibition de l’emblème amazigh – et, par ricochet, celui ressemblant du MAK séparatiste – dans les manifestations de rue du Hirak, un acte légitime? Nombreux sont ceux qui en sont convaincus. Les uns dans les autres, tous ces faits laissent supposer que le Hirak a un autre agenda que celui proclamé de changement de système pour en instaurer un autre plus démocratique. Si tel était vraiment son véritable objectif, pourquoi cette récurrente surenchère dans les revendications? Et pourquoi cette insistance à vouloir imposer, au risque de faire basculer le pays dans un chaos généralisé et dans des violences sans fin qui porteraient un coup fatal à l’Algérie en tant qu’Etat unifié, sa vision des choses? Mais n’est-ce pas là l’objectif réel assigné au Hirak par ses commanditaires? S’il fallait une preuve que c’est effectivement là l’objectif réel qui lui a été assigné, elle a été fournie par l’exclusion de la marche de Kherrata de Samir Belarbi, un “hirakiste pur et dur » jusque-là. Et ce, pour avoir posté, la veille de la marche, un tweet dans lequel il a souligné la nécessité pour le Hirak de sortir de “la logique des marches” et de devenir plus positif…
Mourad Bendris